La logique des Etats est souvent implacable : toutes les entorses faites aux libertés constitutionnelles sont justifiées par la nécessité absolue de protéger les Etats et les citoyens. Si cette logique est tout à fait contestable elle nous oblige à nous interroger sur ce à quoi nous sommes le plus attachés, nous citoyens.
Les Etats démocratiques et les dictatures se rejoignent le plus souvent sur ce terrain : le terrorisme justifie tout. Y compris la cruauté aveugle, celle-là même que l’on reproche aux terroristes, c’est la raison d’Etat. Le renseignement est l’élément central de n’importe quelle guerre. Au XXI siècle, la guerre est économique et numérique. Elle est toujours mondiale et plus que jamais, tous les pays du monde sont engagés dans celle-ci. C’est à celui qui espionnera le plus, et qui niera le plus farouchement avoir espionné l’autre.
Ce jeu de dupes agace tout le monde, les citoyens en particulier, car se sont eux qui sont le plus espionnés. Nous sommes tous considérés a priori comme des terroristes et des espions jusqu’à ce l’on puisse prouver le contraire. Nos conversations téléphoniques, nos e-mails, nos documents sont analysés par les organismes de renseignement du monde entier. Ces mêmes données sont analysées aussi par les grandes entreprises mais pour des raisons différentes. Les heureux possesseurs d’un compte Google le savent, l’entreprise a le droit d’étudier leurs e-mails et tous les documents qu’ils déposent sur ses serveurs.
La réthorique utilisée par les personnes que l’on interroge sur leur sentiment concernant la non-confidentialité de leurs e-mails et leurs documents consiste à approuver ce comportement dans la mesure où le service est gratuit, et à considérer que, de toutes façons, il n’y a pas de secret dans ces documents. S’agit-il d’un véritable argument ou d’un refus d’accepter son erreur ? Ou encore d’un doute sur la véracité des accusations portées contre Google ? Peu importe, car le fait est qu’aujourd’hui la vie privée ne l’est plus tant que cela. Facebook a lui aussi démontré qu’on pouvait tout tenter pour préserver sa vie privée mais que celle-ci pouvait quand même être exposée par des tiers sur leur mur public.
Notre nouveau sondage tente de décrypter nos sentiments réels face à ces phénomènes de non-confidentialité de la vie privée, et au-delà de çà de notre position vis-à-vis du contrôle d’internet. L’internet des objets est une réalité, mais doit-il prendre le dessus sur un internet des humains ? Est-ce que nous, en tant que citoyens, faisons un choix conscient de sacrifier notre vie privée et nos libertés fondamentales sur l’autel de notre protection collective. Protection qui est tout aussi hypothétique que le danger dans lequel nous sommes censés être.
Nous inaugurons ici un cycle consacré à la relation entre l’Homme, le Citoyen, les Etats et ce qui les relie : Internet. Nous inviterons des philosophes à s’exprimer, et nous vous encourageons à vous exprimer vous aussi, en commentant le sondage ou en nous laissant un .
Internet, c'est l'apothéose de l'Humanité, le point de non-retour. Tout y est amplifié, tout y est rapide, tout y est "trop", de manière globale.
Je pense qu'Internet est un outil qui a dérapé, qui est devenu hors de contrôle. Face à ce gouffre du Tartare des possibilités, nous y avons établi une véritable vie 2.0, pas seulement via les médias sociaux, mais via la recherche des questions que nous posent les tréfonds de notre âme.
Et comme d'habitude, nous voulons jouer à un jeu sans en accepter les règles. Alors nous nous voilons la face, nous préférons ne pas croire en tout ce qu'Internet implique (fin de la vie privée, cyber-guerre, malwares, etc.), en espérant que bien caché derrière notre ordinateur, enfermé dans notre chambre, le pantalon aux chevilles, personne ne nous verra.
Il y a beaucoup à dire sur ce sujet. Mais je vous laisse, je vais éteindre mon ordinateur.
Emma