Les deux plus grandes sociétés informatiques mondiales possèdent désormais chacune un brevet permettant de désactiver à distance certaines fonctions de nos appareils mobiles. Le but est de faire respecter les "bonnes manières", comme ne pas prendre de photos au musée ou ne pas téléphoner au cinéma.
Prière de rester bien sage.
Les technologies web et mobiles sont en premier lieu des technologies de liberté (y compris la liberté d'exhiber ses informations personnelles), mais de plus en plus, certains usages ou certaines fonctionnalités sont synonymes de surveillance ou de restriction (Surveiller le smartphone de ses enfants ? Bientôt possible !).
Cette semaine justement, Apple a obtenu un nouveau brevet (déposé en 2008), portant sur "des appareils et méthodes pour l'application de politiques sur un appareil sans fil". Il s'agit en réalité pour certaines personnes – publiques ou privées – d'obtenir la possibilité de désactiver à la demande certaines fonctionnalités de nos appareils mobiles, sans que l'on puisse s'y opposer. Les domaines d'application sont infinis :
- désactiver l'écran des téléphones portables à l'intérieur des salles de cinéma
- désactiver la communication entre appareils mobiles à l'intérieur d'une salle d'examen
- désactiver l'appareil photo dans un musée ou une salle de concert
- etc.
Microsoft n'est pas en reste puisque la société de Redmond a obtenu un brevet similaire en mai 2008. Davantage orienté vers les "Device Manners Policy" (principes de bonnes manières), son but est également de faire respecter, par la force technologique, les règles de bienséance dans les espaces publics. Ou privés. Depuis 2008, Microsoft ne semble pas encore avoir mis les possibilités de ce brevet en application.
Si dans un premier temps, on peut se réjouir d'un monde où tout le monde respecterait les règles sociales. Mais il y a une différence entre obliger les gens à s'y plier via des procédés technologiques de contrôle, et éduquer et responsabiliser les citoyens pour qu'ils respectent ces règles d'eux-mêmes. Est-il possible d'imaginer quels seront les usages futurs d'une telle technologie ? Ne peut-on pas – par exemple – imaginer que ce dispositif de contrôle puisse servir à neutraliser les possibilités de photographie ou de communication lors d'une manifestation ou d'une révolte ? Peut-on laisser à des institutions (publiques ou privées) le droit de décider à notre place ? Une bonne règle est-elle celle que tout le monde suit quels que soient les moyens mis en œuvre, ou celle à laquelle des citoyens acceptent de se soumettre pour l'intérêt collectif ?
Fais pas ci, fais pas ça, prière de rester bien sage. Oui Monsieur !
Source : numerama
Image : Flickr / ~C4Chaos / CC BY-NC-SA 2.0